La Tunisie doit se résoudre à une guerre contre le terrorisme

La Tunisie doit se résoudre à une guerre contre le terrorisme
National
print



Une semaine après l'odieux attentat de Sousse et plus de trois mois après celui du Bardo, le président de la République tunisienne vient d'annoncer que l'état de siège était décrété pour trente jours sur l'ensemble du territoire tunisien. Le président avait d'ailleurs fait part le 26 juin à Sousse de mesures "douloureuses" à venir. Cette mesure radicale est motivée par le danger imminent qui menace la Tunisie et souligne la détermination de l'Etat à faire face au terrorisme tout en abordant de manière plus sereine la mission de développement.
PRÉCAUTION, ANTICIPATION ET FRONT UNI FACE AUX MENACES
Cet état d'urgence est ainsi de nouveau décrété, accordant des pouvoirs accrus aux forces de sécurité intérieure pour leur permettre de mieux relever les défis sécuritaires et le péril libyen. Limitant provisoirement certaines libertés, cette mesure constitue un retour au statu quo ante. En effet, de janvier 2011 à mars 2014, la Tunisie vivait sous l'état de siège qui avait alors été régulièrement renouvelé. Il est clair que le président de la République a consulté le gouvernement les corps constitués et les partenaires de la coalition gouvernementale ainsi que les instances de renseignement avant d'annoncer cette décision qui devrait être positivement accueillie par l'ensemble de la classe politique et de la société civile. Car loin d'être liberticide, ce décret présidentiel conjugue précaution et anticipation. En donnant des pouvoirs accrus aux gouverneurs, cette décision renforce l'autorité des forces de l'ordre sur tout le territoire. En ce sens, la circulation des personnes et le droit de grève pourraient connaitre des limitations provisoires tout comme l'exercice de la liberté de presse. En outre, cette mesure est de nature à permettre aux forces de l'ordre des perquisitions sans rigueur administrative voire des assignations à domicile pour quiconque serait susceptible de troubler l'ordre public. L'état d'urgence est instauré en Tunisie dans un contexte particulièrement volatile et dangereux. En effet, plusieurs indices laissaient pressentir cette mesure qui devrait être accueillie avec soulagement par la population et les partenaires de la Tunisie.
UN CONTEXTE DIFFICILE ET DES DÉFIS MULTIPLES
Ce contexte global est sous-tendu par les points suivants: - Plusieurs attentats ont visé depuis la prise de fonction des nouvelles instances politiques élues les forces de l'ordre et les touristes étrangers dont 59 sont tombés sous les balles aveugles des terroristes. Ces attentats ont été revendiqués par l'Etat islamique. - De nombreuses menaces de l'Etat islamique contre la sécurité de la Tunisie ont été proférées ces dernières semaines. Il est de notoriété, dans les milieux sécuritaires, que la date du 17 Ramadan pouvait être celle d'un attentat annoncé. - De nombreux rapports et informations mettent en relief l'activisme de plusieurs groupes liés au terrorisme et à la contrebande aux frontières sud du pays et parmi les cellules dormantes pro-terroristes. De plus, la confirmation de la mort de Abou Iyadh suite à un raid US est de nature à enclencher un cycle potentiel de représailles. - Depuis plusieurs jours, les forces armées mènent des opérations de pilonnage dans les massifs montagneux du Kef et de Sidi Bouzid, précisément à Djebel Ouergha et dans la délégation de Jelma. Ceci est un indice supplémentaire de l'imminence d'une menace pendant ce mois de Ramadan. - Il faut également noter que le 5 juillet est une date-butoir pour le gouvernement qui a dit escompter reprendre le contrôle de toutes les mosquées hors de son contrôle à cette échéance. Cette reprise en main s'est accompagnée d'émeutes à Kalaa Kebira (Sousse) et de menaces de représailles dans plusieurs autres régions. Dans ce cas également, le président prend la mesure des toujours possibles exploitations politiques et amalgames qui pourraient être mis en œuvre par des forces hostiles à la Tunisie. - De plus, la situation aux frontières sud est très tendue alors que l'armée a commence à construire un mur d'endiguement pour mieux contrôler les mouvements des contrebandiers et des groupes armés qui pourraient leur être liés. - Enfin, plusieurs arrestations ont eu lieu ces derniers jours et il ne fait pas de doute que les renseignements recueillis ont dû convaincre les autorités de l'imminence d'une menace multiforme. De plus, cette campagne d'arrestations se poursuit de manière musclée dans plusieurs régions.
APPEL A LA CONCORDE NATIONALE
Après cette décision présidentielle, d'autres mesures sont attendues pour consacrer un front uni face au terrorisme, notamment un congrès ayant pour but de définir et appliquer une stratégie contre le terrorisme ainsi que le vote sur la loi antiterroriste. Par ailleurs, la mise en place de l'état d'urgence devrait en outre ouvrir la voie à une trêve sur le front des revendications sociales et atténuer aussi bien les protestations et gréves de l'été que les mouvements attendus en automne. Au fond, cette mesure revient à accorder une carte blanche aux pouvoirs publics et leur donner les moyens de stabiliser les situations sécuritaire et sociale afin d'éviter le pire à une Tunisie ciblée par les terroristes de l'Internationale djihadiste et confrontée à un insidieux front intérieur. C'est un message d'union, une invitation a la mobilisation et un appel à la concorde nationale qui sont au cœur de la démarche du président de la République, pleinement dans son rôle et fort d'une attitude combative et déterminée. C'est au prix de cette mobilisation nationale que le berceau du printemps arabe pourra, selon le président, défendre son Etat civil, sa république, sa constitution et sa démocratie naissante.



André Parant juge nécessaire de préserver les acquis démocratiques en Tunisie

Précédent

Migration, sécurité et eau, les principaux résultats du Sommet Tunisie-Algérie-Libye

Suivant